Mes racines / my roots

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Carrière bien remplie

LA PATRIE, lundi le 10 janvier 1916, pages 1 et 2

L’hon. juge H. C. Saint-Pierre s’est éteint paisiblement samedi soir après une courte maladie.

CARRIÈRE BIEN REMPLIE

L’honorable H. C. Saint-Pierre, juge de la Cour Supérieure, est décédé samedi soir à 7.50 , à sa résidence, avenue du Parc, à l’âge de 73 ans, entouré des membres de la famille et muni des suprêmes consolations de l’Église. Sa mort a été calme et résignée, presque sans souffrance, bien que soit ordinairement cruelle et douloureuse la maladie implacable qui a eu raison de sa puissante constitution, le cancer de l’estomac mais quelqu’on [?] la force de caractère qui l’a animé toute sa vie. Il y a fait face presque debout. Ancien soldat, il voulait mourir comme tel, et ce n’est qu’au dernier moment qu’il se laissa conduire à son lit.

Il avait reçu dans l’après-midi la visite de Mgr Bruchési, archevêque de Montréal, et le matin, les derniers sacrements. Deux heures avant d’expirer il avait embrassé tour à tour ses cinq enfants et sa soeur, dame veuve Zéphirine Wilson, qui l’a assisté durant les derniers jours. La visite de Mgr l’archevêque l’a touché sensiblement.

L’hon. juge Saint-Pierre est mort pour ainsi dire sur la brèche. Jusqu’en novembre dernier il vaquait à ses travaux, et ce n’est qu’au commencement de décembre qu’il se mit résolument sous traitement médical. À ce moment tardif il était déjà au terme de sa longue et laborieuse carrière.

Sa mort crée un vide profond sans le monde de la magistrature où l’avait précédé une grande réputation comme avocat criminaliste. Il était considéré comme l’un des juges les plus érudits de la province. Il s’était surtout spécialisé dans les causes civiles par jury; il avait aussi présidé à des sessions de la Cour d’Assises, où son portrait à l’huile figure en proéminence en souvenir des nombreuses et éloquentes plaidoiries qu’il y prononça naguère.

Peu d’avocats de son temps se sont acquis une aussi vaste célébrité. Il a défendu avec succès trente-deux individus acccusés de meutre, entre autres Caza, Benson, Shortis, De Lina, Candy, dont les procès ont beaucoup passionné le public; à l’exception de Shortis dont la sentence de mort fut dans la suite commuée à l’emprisonnement à vie, il les sauva tous de la peine capitale. Il figura au banc de la défense dans des procès retentissants, tels celui des détectives Fahey, Nesglé et Bureau; il était l’aviseur de l’honorable J. Israël Tarte, dans sa poursuite en libelle contre Grenier en 1897.

Comme juge, il rendit plusieurs décisions, qui portées en appel, furent sanctionnées. Mentionnons entre autres le jugement par lequel l’Association de la Police était condamnée à payer une pension au sous-chef Lapointe.

Cette cause alla jusqu’au Conseil Privé qu décida conformément au jugement du juge Saint-Pierre. Une de ses dernières décisions fut celle décrétant que Dame Annie Macdonald ne pouvait être admise à la pratique du droit dans la province de Québec. La Cour d’Appel ratifia son jugement.

Bref, le juge Saint-Pierre s’est acquis à la magistrature comme au barreau une renommée brillante qui rejaillit sur ces deux corps distingués en notre province.

Libéral en politique, M. Saint-Pierre se tint toute sa vie à l’écart des tourmentes électorales, sauf en 1878, alors qu’il brigua la candidature dans le comté de Jacques-Cartier contre un adversaire invincible à cette époque, M. le notaire LeCavalier. Depuis, il s’était consacré tout entier à sa profession d’avocat jusqu’en juin 1902. Nommé la même année, juge de la Cour Supérieure pour le district de Beauharnois, en remplacement de feu le juge Bélanger, il fut transféré comme juge puisné à Montréal en 1909.

Henri Césaire Saint-Pierre naquit à Sainte-Madeleine de Rigaud, le 13 septembre 1942, de Joseph Breillé Saint-Pierre, qui mourut deux ans après et de Domithilde Denis. Il fut confié dès son bas âge à sa soeur aînée, Madame Cyrille Raymond (Odile), marchand [ligne illisible] Stanislas Wilson. À douze ans, il fut envoyé au collège de Montréal où il fit de brillantes études. Lorsqu’il sortit du collège, la guerre de sécession venait d’éclater aux États-Unis.

L’idée lui vint aussitôt de s’enrôler dans l’armée du Nord, mais la famille et ses amis l’en empêchèrent pour le moment et il alla à Kingston commencer l’étude du droit dans le bureau de James Agnew, célèbre avocat du temps. Le goût des armes l’emporta cependant sur celui des codes; il passa aux États-Unis et s’enrôla dans le 76ème volontaire de New York, bataillon qui fut incorporé dans l’armée du Potomac. Au bout de deux mois il était sergent, et se distinguait parmi les plus ardents dans les combats quotidiens. Deux fois blessé, il resta sur le champ de bataille à Mine Run, près de Fredericksburg, et fut compté parmi les morts. On célébra même des services funèbres à Montréal et à l’Ile Bizard pour le repos de son âme. Mais la vie lui réservait d’autres honneurs que celui de tomber sur le champ de bataille; il n’était que blessé et conduit dans les prisons militaires du Sud. Ayant enfin été rendu à la liberté en 1865, il revint à Montréal, après treize mois de captivité et fut admis au barreau de la province de Québec en 1870.

Peu de temps après il entrait en société avec M. Gédéon Ouimet, ancien premier ministre de Québec et ancien surintendant de l’Instruction Publique. Il fut fait Conseil de la reine par le gouvernement fédéral en 1889, et le gouvernement provincial a ratifié cette nomination en 1898.

En 1874, M. Saint-Pierre épousait Mlle Adéline-Albina Lesueur, fille de feu Adolphe Lesueur, marchand de Terrebonne. Il eut de cette union cinq enfants qui lui survirent. Henri A., protonotaire des comtés de Pontiac-Bryson; Georges, ingénieur civil; Annette, épouse de M. L. Bélanger, comptable; Guillaume, avocat du bureau Pélissier, Wilson et Saint-Pierre, dont M. le juge Saint-Pierre fut autrefois le chef, et Juliette, épouse de M. Alexandre Prud’homme, avocat, du bureau Loranger et Prud’homme.

Versé également dans les deux langues, l’éloquence de M. Saint-Pierre n’était pas seulement celle du palais. Il avait une autre conception des devoirs et des responsabilités du Canada. Il avait pour principe de dire: «Soyez anglais, soyez français, soyez irlandais, écossais, etc., mais avant tout et par-dessus tout soyez canadiens.»

L’un de ses principaux discours patriotiques fut celui qu’il prononça en 1898 sur la tombe des vétérans de la guerre américaine inhumés à Montréal. Il fut nommé la même année colonel dans la grande armée américaine et aide-de-camp du général Butterfield, commandant en chef du contingent du Vermont. En 1912 il fut décoré de la Croix de la couronne d’Italie en reconnaissance des services signalés qu’il rendit à la colonie italienne de Montréal.

Quatre soeurs survivent au distingué défunt: Mme Désormeaux, d’Alpena [?], Michigan, âgée de 89 ans; Mme veuve J. Joly, âgée de 87 ans; Mme veuve Léger, âgée de plus de 80 ans; Mme veuve A. S. Wilson, de l’Île Bizard, âgée de 82 ans, et Mme veuve Z. Wilson, de quelques années moins âgée qu’il n’était.

Mme Saint-Pierre, son épouse, l’avait précédée dans la tombe le 19 décembre 1908.

Les funérailles auront lieu demain à 9 heures en l’église St-Georges, angle des rues Bernard et St-Urbain. Le départ de la maison mortuaire est fixé à 8.45 a.m.

LA PATRIE offre à la famille l’expression de ses vives sympathies.



Jacques Beaulieu
beajac@videotron
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